Etude réalisée par: Tasnim TAHA
«La langue est le bien le plus spécifique d’un groupe social et contient son
âme, sa dynamique, sa créativité. De la même manière, pour un individu, sa
langue maternelle est le lieu d’où diffuse continuellement son sentiment
d’identité »*,
Cité in T . NATHAN, A qui
appartient l’enfant, Nouvelle revu d’Ethnopsychiatrie, N° 21n Grenoble, Edition
la pensée sauvage, 1993,1993, pp13-22.
L’enseignement des langues
étrangères demande une certaine didactique notamment dans la transmission
de stratégies d’apprentissage et ce avant de détecter les
difficultés des apprenants en classe de langue. Afin de
pallier ces problèmes, il faut constater que la plupart des difficultés
didactiques sont dû à différenciation phonologique entre le système phonologique
français et arabe, ainsi que la culture cible, qui peut présenter un
obstacle dans l’acquisition des compétences langagières et pédagogique.
Notamment cette étude s’inscrit dans un contexte plus large que la
linguistique. De nos jours, être bilingue ne suffit plus et l’apprentissage de
nouvelles langues, notamment chez les jeunes, est médié non plus dans les
classes mais sur internet avec l’explosion des réseaux sociaux permettant de
communiquer avec des locuteurs différents des quatre coins du monde.
La problématique de ce travail était de
répondre à la question suivante :
En quoi l’expérience professionnelle
peut-elle participer à la détection des difficultés phonétiques
envisagées par les apprenants arabophones ? Et comment peut-elle être
efficace pour proposer des solutions et des corrections phonétiques ?
1.1. Le système phonétique français
comparé avec celui de l’arabe :
Les deux
systèmes phonétiques, français et arabe, sont très différents. De ce fait, une
mauvaise prononciation en français peut engendrer des problèmes de
compréhension, voire même des difficultés à même de bloquer le processus de la
communication entre un natif et un non natif. Par contre, ce problème est moins
grave quand il s’agit du contraire, c’est-à-dire, que les étrangers dans les
milieux arabophones (Au Soudan par exemple) peuvent être compris malgré
les accents particuliers et les interférences phonémiques de leurs langues
maternelles.
Les
voyelles du système français sont plus nombreux que celui de l’alphabet arabe
et se différencient sensiblement, 16 vs 3 seulement : fermées : [i]
et [u], ouvertes : [a] et [aː] (transcrit ā ou â) sans oublier les traits
caractéristiques qui font la différence : la nasalisation, le niveau de
labialisation, le degré d’acuité, etc. Ainsi, le premier problème qui pourrait
être remarqué dans l’apprentissage de la phonétique pour un public arabophone
est le nombre des voyelles. La différence numérique est assez grande, ce qui
n’est pas souvent et pleinement pris en considération par certains enseignants
du FLE, provoquant le plus souvent l’abandon de l’apprentissage de la langue
française en raison de la frustration et l’incapacité de saisir ce nombre des
sons vocaliques.
Tableau 1. Diagnostique des erreurs de prononciation de voyelles françaises
Dégrée d’ouverture
des lèvres
|
Orales
|
Nasales
|
|
Antérieures
|
Postérieures
|
Antérieures
|
Postérieures
|
Fermée
|
[i]
|
[y]
|
[u]
|
|
|
Mi-fermée
|
[e] [Ø]
|
[ø]
|
[o]
|
|
|
Mi-ouverte
|
[ɛ] Ø]
|
[ə]/ [œ] [Ø]
|
[ɔ]
|
[ɛ̃]
|
[œ̃]/ [ɔ̃]
|
Ouverte
|
[a]
|
|
[ɑ]
|
|
[ɑ̃]
|
|
Non-labialisé
|
Labialisé
|
Non-labialisé
|
Labialisé
|
Voyelles qui se prononcent d’une manière similaire dans les deux
langues.
Voyelles qui n’existent pas en arabe et qui sont difficile à
prononcer.
Voyelles qui pourraient se prononcer avec une certaine facilité.
Comme nous
l’avons remarqué précédemment, cette diversité de voyelles en français fait que
les traits comme la position de la langue peuvent être un facteur essentiel
pour le processus de la prononciation.
On observe qu’en
français il y a 9 voyelles antérieures dites aussi « palatales » et 7 voyelles
postérieures, appelées « vélaires », cela dépend de la position de la langue
lors de la prononciation de la voyelle. Tandis qu’en arabe, il n’existe que 3
voyelles qui sont deux antérieurs : [i] et [a] et une seule
postérieur : [u].
Ainsi, alors que la
position de la langue en arabe n’a pas une grande influence au niveau de la
prononciation, en français cette caractéristique revêt un rôle important pour
différencier entre deux voyelles. Ex : le cas des deux voyelles [y] et
[u] dont la position de la langue est dans le premier son palatal et dans
le second vélaire, ce qui pose un problème capital pour les apprenants
arabophones.
La
caractéristique de labialisation ou non labialisation des voyelles est un
phénomène que les apprenants arabophones n’ont pas dans leur langue maternelle.
La seule voyelle labialisé en arabe étant le [u], tandis qu’en français, la
forte tendance à la labialisation est présente dans 11 phonèmes vocaliques.
La
difficulté à prononcer les voyelles nasales peut très rapidement devenir
embarrassant pour l’enseignant du FLE malgré tous les efforts déployés
étant donné que cet élément n’existe quasiment pas dans le système
phonétique arabophone. Ainsi, un apprenant arabophone aura toujours la tendance
à prononcer la consonne nasale comme il le fait en anglais, deuxième langue de
scolarisation. Ex : (voyelle orale+ consonne nasale) comme enfant (ɑ̃fɑ̃),
l’apprenant va le prononcer (anfant) en prononçant avec insistance le T final.
Contrairement aux voyelles, le système arabe comporte beaucoup de
consonnes et la difficulté de prononciation avec les consonnes en langue
française ne se posent qu’avec certains phonèmes : [v], [ʒ], [p], [ɲ], [R].
Tableau 2. Diagnostique des erreurs de prononciation de consonnes
françaises
|
Occlusives
|
Constrictives
|
|
Sourde
|
Sonore
|
Nasale
|
sourde
|
Sonore
|
Bilabiale
|
[p]
|
[b]
|
[m]
|
|
|
Dentale
|
[t]
|
[d]
|
[n]
|
|
|
Vélaire
|
[k]
|
[g]
|
[ɲ]
|
|
|
Labiodentale
|
|
|
|
[f]
|
[v]
|
Alvéolaire
|
|
|
|
[s]
|
[z]
|
Pré-palatale
|
|
|
|
[ʃ]
|
[ʒ]
|
Latérale alvéolaire
|
|
|
|
|
[l]
|
Uvulaire
|
|
|
|
|
[R]
|
Consonnes qui se prononcent d’une manière
similaire dans les deux langues.
Consonnes qui n’existent pas
en arabe et qui sont difficile à prononcer.
Consonnes qui pourraient se prononcer avec une certaine
facilité.
Le problème qui se pose aux apprenants arabophones, c’est la distinction entre
consonnes sourdes et sonores comme dans le cas des [v] qui est souvent prononcé
comme un [f] , ou comme dans le cas de [ʒ] qui est souvent remplacé soit par un [ʃ] notamment en position final. Ex : voyage (vwajaʒ) et par un [dj], phonème le plus proche dans le système arabe quand il
s’agit de la consonne en début du mot. Ex : je [djə]
Concernant le phonème [p] qui est plus souvent prononcé comme [b], c’est le
phénomène le plus fréquent qui pose plus de problème dans le milieu arabophone.
Ici, l’apprenant se trouve devant l’incapacité d’assimiler le caractère le plus
détendu du phonème.
Pour
le [ɲ] c’est la nasalisation qui pose le plus
de difficultés et qui se fait remplacer souvent par le phonème arabe [dj] et en
prononçant le [n].
Dans
le cas de [R], il n’y pas de difficultés à signaler concernant la
production du son parce que le phonème existe déjà dans le système phonologique
arabe. Mais le problème qui pourrait se poser, c’est le groupe de consonne qui
succède ou précéde le phonème. Ex : très, froid, prune où le [R]
doit être prononcé comme le kh en anglais ou la jota espagnol, les apprenants
arabophones le prononcent comme dans le cas des mots : brune, marcher,
roi…etc bien que le phonème [kh] existe en arabe.
En français, les
voyelles ont deux traits caractéristiques quant au niveau acoustique ; les
aiguës/graves et les tendues/lâches. Les apprenants arabophones ne font
pas souvent attention à cela. Ils ne savent pas que la longueur de cavité
influence directement et de manière proportionnelle avec la gravité du son. Il
est à noter également que pour ce qui concerne la tension ou le relâchement des
consonnes, les occlusives sont plus tendues que les constrictives, ce qui
n’existe pas en arabe.
Les
arabophones insistent parfois lors de la prononciation en mettant l’accent sur
les consonnes finales. Ce n’est pas seulement parce que ce phénomène est
courant dans la langue arabe mais aussi à cause de l’interférence de l’anglais,
deuxième langue de scolarisation.
Les
semi-voyelles françaises ne posent pas une grande difficulté chez les
arabophones parce que ces phonèmes existent déjà dans le système arabe.
Cependant, on remarque que dans le cas de [j], les apprenants sont
influencés par la forme écrite des mots plus que l’émission du son. Ainsi,
quand il s’agit de la lecture, ils ont tendances à prononcer les deux [l].
Ex : fille [fij] ils le prononcent [fil], ail [aj], ils le prononcent [ɛl].
Comme
on l’avait remarqué plus haut, les voyelles posent plus de difficultés pour les
apprenants arabophones. Et cela vient du fait que le système arabe est riche en
phonèmes consonantiques et très pauvre, en revanche, en sons vocaliques par
rapport au français : 3 vs 16.
Tableau 3. Les sons vocaliques difficiles pour les arabophones
Son français
|
Possibles variations phonémiques d’un apprenant
arabophone
|
Problème
aperçu chez l’apprenant
|
[i]
|
[i]
|
Problème
d’ouverture des lèvres (phonétique articulatoire).
|
[e]
|
[ɛ]
|
Problème
d’ouverture des lèvres
(phonétique
articulatoire) : le phonème qui est tendue est prononcé avec des lèvres
relâchées.
|
[ə]
|
[ɛ]
|
Le son [ə]
n’existe pas en arabe : il est remplacé par comme [ɛ].
(différence de labialisation et non-labialisation).
|
[Ø]
|
[o]
…………………………………………..
[ɛ]
|
L’apprenant
remplace un son aigu [Ø] avec un grave[o] : Problème d’acuité
(phonétique acoustique).
………………………………..
Ici
il s’agit d’un problème d’arrondissement des lèvres : (phonétique
articulatoire).
|
[œ]
|
[ɔ]
………………………………………….
[i]
|
Dans ce
deuxième cas l’apprenant prononce comme [o], car le son aigu [Ø] est confondu
avec [o] qui est plus grave. Problème d’acuité (phonétique acoustique).
………………………………..
Le son [œ] qui n’existe pas en arabe,
est prononcé comme le phonème [i] qui existe en arabe. Dans ce cas il s’agit
d’un problème d’arrondissement des
lèvres
(phonétique articulatoire).
|
[y]
|
[u]
………………………………………..
[i]
………………………………………….
[u]
|
Le
son [y] qui est aigu est prononcé de manière grave [u], problème d’acuité
(phonétique acoustique).
……………………………
La voyelle
[y] qui est arrondie est
prononcée
avec les lèvres tendues, problème d’arrondissement des lèvres
(phonétique
articulatoire).
………………………………
La voyelle
[y] est prononcée comme en anglais, en produisant une diphtongue qui n’existe
pas.
|
[o]
|
[ɔ]
|
L’apprenant
arabophone ne fait pas la différence entre les sons [o] et [ɔ],
car pour lui, seul existe le son [o]. Problème d’ouverture des
lèvres (Phonétique articulatoire).
|
[ɑ]
|
[a]
|
La voyelle
[ɑ] qui
n’existe pas en arabe est prononcée comme [a]. Le phonème [ɑ] qui est
plus grave est prononcé aigu [a]. Phonétique acoustique.
|
[ɛ̃]
|
[ɛn]
/ [ɛm]
[in] /
[im]
|
Problème
de prononciation de la voyelle nasale prononcée comme une voyelle orale
accompagnée d’une consonne nasale
|
[ɑ̃]
|
[an] /
[am]
[ɛn]
/ [ɛm]
|
Problème
de prononciation de la voyelle nasale prononcée comme une voyelle orale et
accompagnée d’une consonne nasale
|
[ɔ̃]
|
[ɔn]
/ [ɔm]
|
Problème
de prononciation de la voyelle nasal prononcée comme une voyelle orale
accompagné d’une consonne nasale
|
Les aspects suprasegmentaux du français qui avaient été négligés
dans les méthodes «traditionnelles », ont commencé à être travaillés dans les
méthodes «communicatifs». Pourtant, les apprenants ont encore un problème avec
ces aspects provenant en partie des enseignants qui ne les prêtent pas assez
d’attention. Parmi les difficultés qui pourraient provoquer une frustration
chez les apprenants arabophones, on peut noter : l’intonation, l’accent
tonique, la liaison, la syllabation, le rythme, l’enchaînement et
l’assimilation consonantique. Exemple : « Un étudiant » : certains apprenants
vont mettre l’accent sur le « y » d’étudiant, au lieu d’accentuer le [ɑ̃]
de la dernière syllabe du mot.
Il s’agit ici de l’intonation avec une fonction progressive et l’intonation
avec une fonction linguistique :
Le
problème qui se pose ici c’est comment un apprenant peut donner une
expressivité à son message lorsqu’il lit un texte en français, que ce soit un
dialogue, une narration littéraire ou un poème. En effet, malgré le fait que
certains apprenants arrivent plus ou moins à maîtriser l’intonation avec une
fonction linguistique, il leur est toujours difficile de travailler les
sentiments dans une langue étrangère. Donc, le travail essentiel à ce niveau
est de savoir comment travailler tous les éléments extralinguistiques et les
états d’âmes pour exprimer la colère, la surprise, la tristesse, etc. Par
contre, il ne faut pas être très ambitieux parce que ce travail est difficile à
réaliser avec à un public débutant en proie à l’inquiétude et la peur.
Les apprenants
arabophones et surtout les débutants prononcent toutes les phrases de la même
façon; de manière plate. Ils ne font pas la différence entre les différents
types de la phrase. Ex : dans la phrase déclarative où la descente à la
fin de la phrase est importante ; dans la phrase interrogative où ils
doivent monter l’intonation ou dans la phrase impérative à chute descente sur
la dernière syllabe, dans tous ces, les apprenants auront tendance à prononcer
le tout de la même manière et avec la même intonation sans relief.
Le
rythme en français est très régulier et toutes les syllabes inaccentuées ont
souvent la même durée et sont articulées de la même façon que les syllabes
accentuées. En arabe littéraire, en général, c’est la syllabe longue la plus
proche de la fin du mot à l’exception de la dernière. Mais comme les locuteurs
arabes sont influencés par les dialectes, il est difficile de trouver un rythme
unique pour la langue arabe. C’est pour cela que le Coran, haute référence de
l’arabe classique, n’est pas récité de la même manière au Maghreb par rapport
au Moyen Orient.
La liaison et l’enchaînement consonantique n’existent pas en arabe. Les
apprenants débutants qui prennent la langue maternelle comme référence, ont du
mal avec l’idée de l’enchainement. Et comme ils n’ont pas de familiarité avec
ce type de phénomène où une consonne non prononcé se fait rattacher à la
première syllabe du mot suivant commençant par une voyelle ou un
« h » aspiré, ils éprouvent une difficulté à appliquer cette
règle en français. Ainsi, cette ignorance des règles de la liaison fait-elle
une rupture d’une norme linguistique importante de la phonétique
française. Ex : C’est un homme ; Tous les humains.
De ce point de vue, il est important lors du processus d’apprentissage de la
phonétique, de se focaliser sur ce phonème de la liaison, chose qui est
problématique dans l’apprentissage du français parlé mais que plusieurs
enseignants ne prennent assez en considération. Ce phénomène phonologique
de la chaîne parlée, lié à la fois à la morphologie et à la syntaxe, est
important et devrait être intégrer dans la pratique pédagogique afin d’assurer
une bonne compétence dans l’expression orale.
C’est à ce moment qu’intervient le rôle de la position des mots dans les
syntagmes, ce qui montre la difficulté de cette réalisation pour des apprenants
débutants, voire intermédiaires. La difficulté semble d’autant plus notable
lorsqu’il s’agit des liaisons obligatoires et dont la suppression trouble le
processus de la compréhension et la communication par la suite.
Après
la détection des difficultés récurrentes chez les apprenants arabophones, un travail
de correction a été fait. En fait, je me suis basé pour cela sur ces deux
ouvrages : « La phonétique : audition, prononciation,
correction » de Dominique ABRY et Julie VELDEMAN-ABRY , publié en 2007
par CLE international, ainsi que « Introduction à la méthode verbo-tonale
de correction phonétique », de Raymond Renard- Didier.
L’objectif ici est de discriminer l’emploi des voyelles fermées [i], [y], [u]
surtout le son [y] qui n’existe pas en arabe et qui est souvent confondu avec
ces deux autres phonèmes [i], [u].
Phonologiquement parlant, la langue arabe est considérée comme une langue à
trois voyelles de base qui sont : [a], [u], [i] tandis que la langue
française est une langue comportant six voyelles de base qui sont : [a],
[u], [i], [y], [e], [o]. Cette différence au niveau du nombre de voyelles
provoquerait chez l’apprenant un amalgame entre le son appartenant à la langue
étrangère et celui qui lui est familier, c’est -à -dire le son existant déjà
dans son répertoire phonique.
Ainsi, au lieu de prononcer le mot « tu » [ty],
l’apprenant remplace le [y] par un [u] et prononce comme pour exemple le
mot « tout » [tu]. Résultat : un changement radical du sens.
Afin de sensibiliser l’apprenant à produire le son [y], il faut, selon la
méthode verbo-tonal, discerner la nature de la relation entre le son
prononcé et le son référence. On remarque que les deux sons sont fermés et
arrondis, la seule différence est le fait que le [y] soit antérieure et
prononcée avec la langue est projetée en avant. Pour aider l’apprenant à bien
produire le son [y], on peut lui proposer des mots où la voyelle serait à la
fin d’une intonation montante. Ex : Il fume ?; C’est la lune ?.
Un autre exercice consiste à donner des mots où la voyelle serait précédée par
les consonnes [s] ou [t], les deux consonnes les plus convenables pour la
réalisation d’une voyelle aiguë grâce à leurs traits caractéristiques,
antérieures, sourdes et orales. Ex : sur, voiture, costume. De plus, il
serait judicieux d’offrir à l’apprenant des mots où la voyelle serait précédée
par deux consonnes. Ex : brune, rue, studio où le son est plus aigu.
Ici, les apprenants auront l’occasion de connaitre les différents types
d’emploi et de graphies du « e ». Ils font d’abord un repérage sur les emplois
du phonème avant d’écouter une chanson où les trois sons sont abordés. Puis il
leur est demandé de distinguer chaque son entendu en le coloriant avec une
couleur différente avant de souligner le «e» muet qui pourrait tomber.
Pour aider les apprenants qui prononcent [e] à la place de [ɛ],
la méthode utilisée propose une intonation descendante avec des consonnes
occlusives en position initiale. Tandis que pour le cas inverse, c’est-à-dire
quand l’élève remplace le [e] par le [ɛ],
la solution est de monter l’intonation en utilisant des consonnes constrictives
en position finale.
Avec cette activité, le travail est basé sur l’entrainement à envisager afin
d’aider l’apprenant à produire un son qui n’existe pas dans sa langue
maternelle. L’activité est une lecture des petits textes qui contiennent les
deux phonèmes (fermé et ouvert). Il y a deux types de correction pour l’aider à
prononcer [Ø] et [œ] :
D’abord, quand l’apprenant remplace le [œ] par un [ɛ] :
le travail qui doit être réalisé est de monter d’abord l’intonation en
chuchotant et en ciblant des consonnes graves comme [b], [r], [m], [v], [p],
[w] pour pouvoir obtenir une voyelle plus grave.
L’autre type d’exercice consiste ’est quand l’apprenant remplace le [œ] par un [o] : dans
ce cas il faut juste choisir des consonnes aiguës comme [s], [z], [t], [d] pour
en maintenant l’intonation montante.
Etant donné que la nasalisation n’existe pas dans le système arabe (sauf dans
certaines lectures de Coran), les apprenants arabophones ont du mal à prononcer
les voyelles nasales et ont tendance de remplacer la nasalité par la
prononciation de la consonne orale ([m], [n]). En fait, une voyelle
nasale se distingue d’une voyelle orale par deux choses. D’abord, parce qu’elle
est sombre, ce qui définit la nasalité qui convoque une résonateur
supplémentaire où l’air expiré s’échappe par les fosses nasales. Ensuite, parce
qu’elle est moins tendue à cause de l’abaissement de la luette (le palais mou)
qui est la partie mobile à l’arrière du voile du palais qui libère l’accès à la
cavité nasale. De ce fait, on peut détecter les problèmes les plus fréquents
dans la production des sons nasals, qui sont les suivants :
- Quand il
s’agit d’une voyelle orale suivie par une consonne nasale [n]. Ex : [an]
au lieu de [ɑ̃].
- Quand il
s’agit d’une voyelle orale sans trace de nasalité. Ex : [a] ou [ɑ] à la place de [ɑ̃].
- Le cas de la
présence d’une voyelle partiellement nasalisée mais dont le timbre ne
s’apparente pas à celui de son cible.
- Aussi, la
confusion entre deux timbres joue-t-elle un role comme dans l’exemple :
l’émission du mot chambre qui est prononcé [ʃɔ̃bʁ] au lieu de [ʃɑ̃bʁ].
Ainsi, pour une meilleure correction, il serait opportun de partir de
l’erreur la plus répandue (voyelle orale suivie de consonne nasale : le
cas de la prononciation de [an] au lieu de [ɑ̃]).
Ex : Le vent souffle très fort où le
mot vent est réalisé [van] au lieu de [vɑ̃].
Le procédé est le suivant : une suppression de la consonne parasite, le
[n], et une nasalisation de la voyelle orale.
Le travail se déroule en deux temps.
- 1er temps : Faire
prononcer [ləva] avec une intonation descendante en
allongeant excessivement la durée de la voyelle [a]. La production sonore doit
être accompagnée d’un geste de la main vers le bas avec une inclinaison du
buste le plus possible. Ces techniques pourront être suffisantes à éliminer le
[n] superflu. En cas de besoin, une répétition serait utile pour s’assurer que
toute trace de nasalité a disparu chez l’élève.
- 2ème temps : de la même manière
et avec la même gestuelle, j’ai donné la consigne de faire prononcer [ləva] en descendant aussi l’intonation et allongeant suffisamment la voyelle
[a] avant de nasaliser la voyelle au milieu de production pour qu’il produise
un passage de [a] à [ɑ̃].
Au niveau physiologique, l’abaissement de
la luette est facile en raison de la durée exagérée de [a] accompagné à
l’intonation descendante. Ainsi, enfin, la tendance au relâchement des organes
souhaités est en soi plus spontanée.
Concernant les semi-voyelles, les
apprenants arabophones n’ont pas un problème véritable au niveau de la
production des sons parce que les phonèmes existent déjà dans le système arabe.
Cependant, il existe parfois une confusion entre le [ɥ] et le son [w] dû à une erreur acoustiques entre le aigu/grave.
C’est un des problèmes fondamentaux qui frustrent les apprenants
arabophones. Et cette frustration vient du fait qu’il y beaucoup de mots
en français de sens différents et que la différence se fait avec ces deux
lettres : ex : poire, boire ; Paris, Bari (une des trois villes
qui composent la capital soudanaise) ; par, bar ; pain, bain et
d’autres mots qui changent complètement le sens de la phrase.
Donc, et comme le phonème [p] n’existe pas en arabe, les apprenants
n’arrivent pas à faire la différence entre ces deux phonèmes et prononcent tout
de la même façon, remplaçant le [p] par de [b]. En conséquence, il y a souvent
des malentendus avec les natifs qui gênent le processus de la communication.
Pour corriger cette faute, il faut aider l’élève à produire une consonne plus
aiguë. Dans ce cas, il faut faire appel aux voyelles aiguë :[i], [e],
[y] et mettre le [p] en position initiale en utilisant une intonation
montante
Le [v] n’existe pas en arabe et les arabophones ont du mal à
faire vibrer les cordes vocales pour produire ce son grave. Donc, la
solution est d’aider l’élève, il faut partir des voyelles ouvertes et
graves : [a], [o], [u] en descendant l’intonation et en mettant
la consonne en position finale ou intervocalique.
Souvent les apprenants arabophones remplacent le [ʒ] qui n’existe pas dans le système phonologique arabophone par le [ʃ]. Donc, dans ce cas, il faut aider l’élève pour obtenir une consonne moins
aigue. Et cela se réalise en utilisant une intonation descendante et une
voyelle ouverte : [ɛ], en mettant la consonne en position
intervocalique ou finale. Ex- âgé [aʒɛ].
La prosodie comme la définit Larousse est l’ensemble des règles permettant
d'établir une correspondance juste entre les syllabes accentuées ou atones des
paroles et les temps forts ou faibles de la musique et c’est une étude de la
forme et de la substance des éléments phoniques dont les limites ne coïncident
pas avec celles du phonème, qu'elles soient inférieures (comme les mores) ou
supérieures (comme la syllabe, le mot, le syntagme et la phrase). [Ainsi, les
recherches sur l'accent et sur l'intonation ; l'étude du rythme, du débit
et des pauses dans la parole.
L’arabe est une langue à accent fixe car ses règles d’accentuation sont régies
par le facteur du poids syllabique, qui rend prévisible la place de l’accent
dans le mot. Et comme le français est une langue avec un accent fixe qui se
positionne toujours à la dernière syllabe où la musique est très régulière, la
correction de prononciation doit être faite avant tout avec la prosodie.
Ainsi, il faut être conscient dans la correction des fautes en prenant compte
de la prosodie française.
La méthode
s’est développée partout dans les quatre recoins de la planète mais elle a eu
énormément de succès dans le domaine de l’apprentissage/enseignement des
langues vivantes que de la réhabilitation et de l’éducation des personnes
malentendantes, les enfants ayant une parole altérée ainsi que dans la thérapie
des désordres de la parole. En s’appuyant sur l'importance de la langue
comme instrument de communication, cette méthode expose que la perception
est un élément essentiel.
- Puisque
l’apprenant aperçoit la langue d’apprentissage au travers d’un prisme de sa
langue maternelle, c’est normal donc qu’il ait un accent.
- En le prenant
pour un sourd, le travail essentiel est de rendre l’apprenant sensible, dans la
procédure de la réception aussi que celle de la production, aux
caractéristiques oraux du français (prosodie : intonation, pauses, rythmes
et phonèmes), puisqu’une personne sourde est forcément qu’elle soit muette.
- Le professeur
doit utiliser son corps au maximum (association des sons à des gestes,
frappement de mains, etc.) pour inviter les apprenants de faire pareil, chose
qui peut effacer la timidité, la sensation de ridiculité, etc.
- Le travail
doit se faire dans un contexte à partir des dialogues et pas
seulement avec des mots ou énoncés isolés afin d’avoir une bonne interaction
verbale.
A l’issue de
ce travail d’analyse que j’ai effectué dans un domaine important de
l’enseignement des langues étrangères ; la phonétique, il m’est
toujours surprenant et inconcevable de réaliser que, trop souvent, les
enseignants de FLE ne pressentent pas la simplicité, la richesse et la
productivité phonétique de la langue parlée.
En premier
lieu, il est nécessaire de montrer que cette simplicité provient de la
flagrante et simple réalité qu’il nous est donné de prononcer toute une langue
(non sans quelques notions de grammaire) à l’aide seulement de très peu
d’éléments sonores et prosodiques.
En deuxième
lieu, il faut expliquer que la richesse et la productivité proviennent du fait
qu’il nous est possible, avec la maitrise d’un petit nombre d’éléments, d’exprimer
toutes nos idées. Et cette capacité se réalise tout simplement en combinant
d’une façon presque illimitée un ensemble de 32 à 36 sons soutenus par les
quatre traits prosodiques essentiels : deux types d’accents et deux
mouvements intonatifs. De ce fait, le travail de la correction phonétique doit
être basé sur ces quatre éléments.
Enfin, la problématique que
j’ai choisi d’élucider est le résultat de ce long parcours d’apprentissage du
français, puis de l’approfondissement des acquis théoriques qui a fait resurgir
mes propres frustrations d’apprentissage par le passé. A cette époque, j’étais
étudiante et je rêvais d’avoir un moyen ou quelques clés de détection des
codes de la langue française, afin de moins souffrir pour me faire comprendre par
les étudiants francophones que je rencontrais au CCF pendant les cours de
conversation.
Tableau d’alphabet phonétique
1-les dix-sept consonnes
API*
|
Mots
écrit
|
b
|
bal, robe
|
p
|
petit
|
d
|
date
|
t
|
tordu
|
k
|
carpe, kiwi, qui
|
g
|
gare, bague
|
s
|
souris,
pièce
|
z
|
zèbre, oser
|
f
|
face, phare
|
v
|
voir, wagon
|
l
|
la, alors
|
m
|
maman
|
n
|
non
|
ɲ
|
gnôle, agneau
|
ʃ
|
chat, short
|
ʒ
|
journal,
gorge
|
ʁ
|
rare
|
|
2- les douze voyelles orales
API
|
Mots
écrit
|
a
|
patte,
papa
|
ɑ
|
pâte,
tas
|
ə
|
fenêtre
|
œ
|
fleur
|
ø
|
jeu,
feu
|
e
|
été,
nez
|
ɛ
|
mer,
j’aimais
|
i
|
fille,
ami
|
o
|
sot,
seau, sceau, saut
|
ɔ
|
porte,
port, or, mort
|
u
|
coup,
août
|
y
|
nu,
j’ai eu
|
|
3-les quatre voyelles nasales
API
|
Mots
écrit
|
ɑ̃
|
rang,
avant
|
ɛ̃
|
rein,
brin, pain
|
ɔ̃
|
bon,
ton
|
œ̃
|
brun, un
|
|
4-les trois semi-consonnes (ou semi-voyelles)
API
|
Mots
écrit
|
j
|
yeux, ail
|
w
|
fouet (/fwɛ/), voir (/vwaʁ/)
|
ɥ
|
fuite (/fɥit/), lui (/lɥi/)
|
|
* API : Alphabet
Phonétique International
Lieu d’articulation des consonnes
articulateur
|
dénomination
|
lèvres
|
labial
|
Dents
|
dental
|
Alvéoles
|
alvéolaire
|
palais dur
|
palatal
|
palais mou, voile du palais
|
vélaire
|
luette
|
uvulaire
|
pharynx
|
pharyngal
|
pointe de la langue
|
apical
|
dos de la langue
|
dorsal
|
bouche
|
buccal
|
nez
|
nasal
|
ABRY, Dominique et VELDEMAN-ABRY, Julie.
(2007). La phonétique : audition,
prononciation, correction. Paris : CLE International.
CALLAMAND, Monique. (1981). Méthodologie
de l’enseignement de la prononciation. Paris : CLE International.
CUREAU, J., VULETIC, B.(1976).
Enseignement de la prononciation. Paris. Didier.
GALLON, Fabienne. (2002). Extra
! 1 (Livre de l’élève et guide pédagogique). Paris : Hachette Livre.
KANEMAN-POUGATCH, Massia
et PEDOYA-GUIMBRETIERE, Elisabeth. (1991). Plaisir des sons. Paris
: Hatier – Didier. Raymond Renard, Introduction à la
méthode verbo-tonale de correction phonétique - Didier.
Caractéristiques articulatoire,
université-de-Montpellier :
http://asl.univ-montp3.fr/e58fle/caracteristiquesarticulatoiresetacoustiques.pdf
Enseignement / apprentissage de la
langue française , l’approche verbo-tonale :
http://phonetiquedufle.canalblog.com/archives/2008/06/06/9472380.html
Interférence linguistique :
http://www.memoireonline.com/10/12/6177/m_Rapport-de-stage-sur-l-enseignementapprentissage-du-FLE--lecole-Al-Nahdha-dAbu-Dhabi24.html
Méthode verbo-tonal, Petar
Guberina, wikipédia :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Petar_Guberina
Phonétique corrective- méthode
verbo-tonale :
http://w3.uohprod.univ-tlse2.fr/UOH-PHONETIQUE-FLE/
Phonétique française, université de
léon :
http://flenet.unileon.es/phon/phoncours.html
Table des matières
Introduction.. 1
1. Diagnostique
des erreurs de prononciation chez les apprenants arabophones.. 2
1.1. Le système phonétique français comparé
avec celui de l’arabe.. 2
1.2.
Les voyelles :. 3
1.2.1.
Le lieu d’articulation et la position de la langue.. 5
1.2.2.
La labialisation des voyelles en français.. 5
1.2.3.
Les voyelles nasales.. 6
1.3.
Les consonnes.. 6
1.3.1.
L’opposition entre consonnes sourdes et sonores.. 8
1.3.2.
Caractère aigu/grave des consonnes.. 9
1.3.3.
Les consonnes en position finale.. 9
1.4.
Les semi-voyelles.. 10
2. Analyse
des erreurs de prononciation.. 10
2.1.
Analyse des erreurs face aux aspects suprasegmentaux du français :. 16
2.2.
L’intonation :. 17
2.2.1.
L’intonation avec une fonction expressive.. 17
2.2.2.
L’intonation avec une fonction linguistique.. 18
2.3.
Le rythme du français.. 18
2.4.
La liaison.. 19
3. Travail
de correction phonétique.. 20
3.1.
Correction des voyelles.. 21
3.1.1.
Les voyelles fermées [i], [y], [u].. 21
3.1.2.
Les voyelles ouvertes: [e], [ɛ], [ə].. 22
3.1.3.
Les voyelles [Ø]et [œ].. 23
3.1.4.
Les voyelles nasales [ɔ̃] [ɑ̃], [ɛ̃].. 24
3.2.
Correction des semi-voyelles [j], [w] et [ɥ].. 26
3.3.
Correction des consonnes :. 27
3.3.1.
Les consonnes [b] et [p].. 27
3.3.2.
Les consonnes [f] et [v].. 28
3.3.3.
Les consonnes sifflantes et chuintantes [ʃ]
et [ʒ].. 28
3.4.
Correction de la prosodie.. 28
4. Méthode
de correction phonétique (la méthode verbo-tonale P. Guberina).. 29
4.1.
Définition :. 29
4.2.
Quelques principes de la méthodologie de la méthode (verbo-tonale):. 30
CONCLUSION... 31
Annexe
1.. 32
Annexes
2.. 34
Bibliographie :. 35
Sitographie :. 36
******
Etude réalisée par: Tasnim TAHA
Paris-Vichy, 31/05/2014